Exposition collective hors les murs — Regards croisés

 

Issu de la collaboration entre le Conseil régional de l’environnement du Centre-du-Québec (CRECQ) et la Fondation Grantham pour l'art et l'environnement, le projet Regards croisés propose des correspondances entre le travail d'artistes en art actuel et le travail de protection de l'environnement mené par le CRECQ. Développée autour des quatre champs d’intervention du CRECQ par le commissaire Daniel Fiset, l’exposition au passage Sibosis met de l’avant les œuvres de Geneviève Baril (milieux naturels), Yen-Chao Lin (changements climatiques), Maude Arès (matières résiduelles) et Marjolaine Bourdua (développement durable).

L’exposition est présentée dans le cadre de l’Entente de développement culturel. La Fondation remercie vivement la Ville de Drummondville et le ministère de la Culture et des communications du Québec de leur appui.

Regards croisés a lieu jusqu’au mois d’août 2025, au passage Sibosis, à Drummondville. Le passage Sibosis relie la rue Hériot au stationnement P-2 près du parc Woodyatt de Drummondville. L’accès par la rue Hériot se situe entre les rues du Pont et Cockburn.

Graphisme : Marie-France Gaudet et Evelyne Lupien.

 

Regards croisés

Un texte de Daniel Fiset

 

Bien que les deux organismes aient des missions distinctes, le CRECQ et la Fondation Grantham œuvrent tous deux par un réel souci de l'environnement. Le mot 'souci' évoque ici un intérêt particulier pour quelque chose, mais aussi une préoccupation, une inquiétude quant à l'état actuel du monde: toutes des postures qui nous habitent au quotidien comme artistes ou travailleur·e·s de la culture, mais aussi comme citoyen·ne·s. Ce que nous désignons maintenant comme l'écoanxiété se nourrit bien évidemment de nos soucis: ceux qui nous terrassent momentanément, puis nous encouragent à changer les choses, à bousculer nos habitudes, à ralentir, à regarder ce qui se passe avant et après un geste pour mieux en comprendre ses impacts.

Regards croisés invite quatre artistes dont les processus font écho à ce qui motive les actions environnementales du CRECQ à présenter des images tirées de toutes les étapes de leurs démarches. Autant le processus de cueillette qui mène à l'exécution d'un projet que le temps qui fait son œuvre sur des installations présentées en public; autant des œuvres en cours de réalisation dans l'atelier que l'après-vie des matériaux qui ont été utilisés dans une sculpture ou une installation. Sont ainsi mises de l'avant différentes façons de faire des artistes, leurs manières de voir, leurs états d'être; la preuve que tout changement peut se réfléchir autant dans l'action que dans l'image, et qu'il y a de réelles correspondances entre le travail de l'art et le travail de protection de l’environnement.

Photos : Richard-Max Tremblay

 
 
 

Milieux naturels de Geneviève Baril

Texte de Daniel Fiset

Les projets de Geneviève Baril sont informés à la fois par la spécificité d'un lieu et par la mobilité : de longues marches dans la région de la Mauricie, où elle vit et travaille, sont l'occasion pour l'artiste de récolter les diverses matières qui composeront ses installations - une démarche qui se veut la plus responsable possible, pour éviter qu'elle mette en danger la capacité de régénérescence des milieux naturels.

Présentées en galerie ou dans l'espace public, les œuvres de Baril sont doublement évolutives : si elle prend soin de les compléter graduellement, laissant voir les armatures et les cadres qui accueilleront le matériaux cueillis, le temps se chargera aussi de modifier l'aspect physique de tout élément naturel utilisé. Mais d'identifier ce changement comme une détérioration revient à ignorer l'un des plus grands effets du travail de l'artiste : le constat que les choses qui fanent, se décomposent, sèchent, et flétrissent sont aussi empreintes de poésie.

Texte du CRECQ *

Conserver nos milieux naturels pour une biodiversité riche et vibrante

Les milieux naturels forment notre paysage. Les forêts, les milieux humides et hydriques, les friches, ainsi que l’ensemble des écosystèmes composent la diversité de cette trame vivante qui nous entoure. Source de vie, les milieux naturels nous offrent des services inestimables telle la filtration de l’air que l’on respire et de l’eau qui nous abreuve.

Des plaines agricoles qui accueillent les oiseaux champêtres aux vallées appalachiennes qui abritent de grands mammifères, ces milieux naturels sont l‘habitat d'une multitude d’espèces qui méritent qu’on s’y attarde. À une époque où le développement du territoire et la mise en valeur de notre patrimoine naturel doivent être considérés comme un tout, il est primordial de prendre le temps d’y réfléchir ensemble. De Villeroy à Drummondville, de Nicolet à Saint-Martyrs-Canadiens, nos milieux naturels méritent d’être conservés et adéquatement connectés pour protéger ce fragile équilibre qu’est notre environnement.

 

Changements climatiques de Yen-Chao Lin

Texte de Daniel Fiset

Depuis quelques années, le travail de Yen-Chao Lin est nourri par un intérêt pour la figure du sourcier. Les sourcier·ère·s possèdent un certain don divinatoire, pouvant localiser, à l'aide d'une baguette de coudrier ou d'un pendule, des sources d'eau cachées dans la nappe souterraine. Expliqués par une sensibilité à des résonances magnétiques, leurs dons leur auraient aussi permis de détecter toutes sortes de ressources naturelles enfouies, tels que des métaux ou des minéraux. Ce principe de 'détection' du non-visible est au cœur d'œuvres récentes dans lesquelles des cristaux de verre, vus par des plaquettes de miroir placées au-dessous, semblent pousser sous une surface. Si plusieurs contestent le don des sourcier·ère·s, sa persistance à travers l'histoire offre une preuve de cette obsession à révéler tout ce qui se cache sous la terre, et duquel l'humain pourrait tirer avantage ou profit. Cette tension entre le visible et l'invisible, le présent et l'absent, rappelle l'expérience des changements climatiques: bien que les phénomènes météorologiques ne soient pas des 'objets visibles', les impacts sensibles de leurs dévastations sont grandissants, et de plus en plus sévères.

Texte du CRECQ

La nécessité d’une action locale dans une vision globale

Les défis climatiques actuels exigent une mobilisation sans précédent, tant à l’échelle planétaire qu’à l’échelle locale. Au Centre-du-Québec, les impacts des changements climatiques se font déjà sentir et exposent les vulnérabilités de nos communautés. Par conséquent, nous devons agir sur deux fronts : celui de la réduction des gaz à effet de serre (GES) et celui de l’adaptation aux changements climatiques.

La mobilisation est en marche puisque plusieurs de nos municipalités de la région ont endossé la Déclaration d’urgence climatique et certaines ont adopté un plan de réduction de leur GES. Agriculteurs, chefs d’entreprises ou citoyens, tous ensemble nous devons nous activer et saisir les opportunités que nous offrent les actions liées à la lutte aux changements climatiques pour améliorer la qualité de vie et la résilience des communautés, diversifier l’économie et améliorer la qualité de l’eau et des écosystèmes de notre région.

 

Gestion des matières résiduelles de Maude Arès

Texte de Daniel Fiset

Les installations de Maude Arès fonctionnent à la fois sur le mode micro et macro. Constituées d'un amoncellement de petites choses trouvées ou fabriquées, et collectionnées avec grand soin par l'artiste, les œuvres sont difficiles à appréhender d'un seul coup d'œil : elles invitent au déplacement, souhaitant mettre en relation celleux qui la regardent avec les objets, eux-mêmes accueillis par une série de dispositifs de présentation et d'accrochage. Le temps laissera évidemment ses marques sur les projets: présentées en extérieur, les installations encouragent la cohabitation avec des espèces végétales ou animales, alors qu'en galerie, les passages du public sont visibles par les micro-déplacements des formes et les poussières qui s'y accumulent. Faites au sein de ses installations, des performances impliquent la fabrication de ce qu'Arès appelle des outils-mystère: formés de bricolages hétéroclites, ces instruments peuvent évoluer dans le temps à la manière d'organismes vivants, se fusionner et se croiser, trouver sans cesse de nouveaux usages.

Texte du CRECQ

Réduire, réutiliser, recycler et valoriser

Suivant l’augmentation de la population et de sa consommation, la quantité de matières résiduelles produite chaque année a pris de l’ampleur partout au Québec et notre région n’y échappe pas. Pour faire face aux défis, nous devons réduire notre consommation, réutiliser, recycler et valoriser nos matières.

D’année en année, les humains consomment plus que ce que la Terre peut produire. Il est grand temps de réaliser un véritable virage dans nos habitudes de consommation et d’agir pour réduire notre production de déchets. La réduction à la source et le réemploi sont les moyens les plus sûrs et les plus respectueux de nos écosystèmes pour réduire le flux des matières à éliminer. Il ne tient qu’à nous de porter un regard critique sur nos habitudes de consommation et de prendre conscience de cette spirale qui nous pousse à en vouloir toujours plus.

 

Développement durable de Marjolaine Bourdua

Texte de Daniel Fiset

Comment le développement durable, une notion qu'on associe surtout à l'impératif d'une production 'responsable', a-t-il laissé sa marque sur le travail des artistes? Et, en retour, quelle part du travail des artistes peut-elle transformer le développement durable, nous encourageant à le pousser encore plus loin? Ces questions traversent le travail de Marjolaine Bourdua qui pense la possibilité d'une pratique artistique qui perdure dans le temps en mettant de l'avant des stratégies de décentrement de l'individu, de questionnement de la productivité à tout prix, d'une mise en avant de la décroissance. Un intérêt pour ce qui contient a encouragé l'artiste à suivre un stage intensif de vannerie, un art qui s'est noué à ses œuvres récentes : comme une nouvelle technique, certes, mais aussi comme un principe par lequel envisager notre rapport au monde extérieur. Les images choisies sont d'ailleurs tirées d'activités de cueillette et de préparation de matériaux, laissant voir toute l'importance de la réflexion qui est menée avant la présentation publique de ses sculptures et installations. 

Texte du CRECQ

Répondre aux besoins des populations actuelles, sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs.

Le Centre-du-Québec accueille en son sein le berceau du développement durable et de nombreux acteurs s’y investissent dans la mise en œuvre de ce grand concept. Dans une optique globale, ce principe prend en compte le caractère indissociable des dimensions environnementale, sociale, économique et de gouvernance des activités de développement.

De nombreuses organisations et entreprises prennent le virage d’un développement plus durable au Centre-du-Québec, dont certaines sont devenues des références à l’échelle nationale que ce soit en aménagement du territoire, économie circulaire ou symbiose industrielle. Dans la pratique, le développement durable est une démarche qui exige des changements de comportements et d’attitudes complexes et difficiles. Pour réaliser ces changements, les acteurs régionaux doivent être unis autour d’une vision dynamique et intégrée et s’engager dans un processus d’amélioration continue en développement durable.

 

* Le Conseil régional de l'environnement du Centre-du-Québec (CRECQ) est un organisme de référence en environnement regroupant des intervenants.